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Interview de

Martin Jamar

(2001)

Merci d'avoir accepté de participer à l'association FABBLE ; vous êtes avec Eric Stalner, un des premiers dessinateurs à avoir cru en l'association et nous vous en remercions.

1 Vous auriez donc dû faire partie des premiers dossiers traités mais nous avons dû freiner notre enthousiasme et patienter pour découvrir cet album. A la lecture de cet album, on commence à distinguer le dénouement de l'histoire. Pouvez-vous nous décrire brièvement ce qui attend nos lecteurs ?

Ce qui attend nos lecteurs, je ne peux pas trop le dévoiler; pour 2 raisons :
Je veux maintenir le suspense jusqu'au bout et, de toute façon, je ne sais pas encore exactement moi-même comment notre histoire se terminera. Disons que j'espère être surpris jusqu'au mot "FIN".

2 L'album que vous venez de terminer à pris beaucoup de retards ; le nombre de salons/festivals ou la naissance de votre fille en sont-ils les raisons ?

Oui, le tome 6 fut le plus long à terminer.
Une des raisons principales est, effectivement, le temps consacré à la promotion du tome 5, entraînant un rythme de travail très haché, irrégulier, bref, mauvais pour le moral. Si je me souviens bien, j'avais réussi à terminer (sans parler des couleurs) 12 planches en 6,5 mois ...!
Le tome 7 a mieux démarré: 11 planches finies en 3,5 mois.
La naissance d'un 3ème enfant a eu beaucoup moins d'incidence en soi (nous sommes mieux organisés !) Mais il est vrai que combiner travail chez soi et une vie de famille est rarement facile.

3 Mais nous savons que les fans n'auront pas à attendre trop longtemps le suivant car vous avez décidé de prendre un peu d'avance ?

De l'avance, c'est beaucoup dire: j'ai surtout demandé à mon éditeur de ne rien prévoir comme festivals, dédicaces, etc. Ce qu'il a très bien compris ! (rires)
En retour, je devrai bouger nettement plus lorsque le tome 7 paraîtra. Le programme de promotion de l'album risque d'être chargé.

4 Comment travaillez-vous avec Jean DUFAUX ?

Nous nous rencontrons régulièrement, ... autour d'une bonne table.
Nous regardons mes crayonnés; il me donne la suite de son scénario à lire; je découvre donc l'intrigue par "épisodes".

5 La série "Les voleurs d'Empires" se termine avec le prochain volume, que ressentez-vous à l'approche de la fin de cette longue série ? de votre collaboration avec Jean DUFAUX ?

Des sentiments partagés: à la fois un certain soulagement car c'était une œuvre de longue haleine, que nous avons pu mener à son terme; mais aussi un peu de tristesse à l'idée de quitter des personnages avec qui j'ai passé tellement de temps.
Enfin, quand on approche de la fin d'une telle série, on commence déjà à penser au projet qui suivra, ce qui est assez excitant !

6 Quels souvenirs gardez-vous de "François Jullien" et de "La Lettre de Feu" ?

"François Jullien", ce sont mes tout premiers péchés de jeunesse (en BD !).
De bons souvenirs dans l'ensemble, sauf pour la fin car les relations avec mon scénariste de l'époque étaient devenues un peu difficiles. Il n'empêche que je lui dois pas mal: il m'a bien guidé dans mes débuts.
"La lettre de feu": je le vois comme un album de transition: c'était une expérience avec un scénariste débutant (mais tout àfait sympathique !).

7 Vous sentez-vous proche de certains de vos personnages que ce soit dans " Les voleurs d'Empires " ou vos précédents albums ?

Oui. Certains personnages sont bien sûr plus attachants que d'autres: je préférerais croiser dans la rue Anaïs ou Nicolas plutôt que Lévadé, sans parler de la Mort.
En tous cas, Jean Dufaux a composé une très belle galerie de portraits.

8 Vos bandes dessinées se passent toutes au 19ème siècle, êtes-vous passionné par l'histoire ?

C'est vrai pour François Jullien et les Voleurs d'Empires, mais avec la Lettre de feu, j'ai fait une incursion dans le XVIIème siècle.
Oui, je suis passionné par l'Histoire. Je rêve d'avoir plus de temps pour dévorer plus de biographies historiques.

9 Souhaitez-vous par la suite dessiner d'autres époques ?

Pas dans l'immédiat. Mais plus tard, oui je sortirai du XIX siècle.
De toute façon, le contemporain ne m'attire pas vraiment: j'ai besoin de remonter dans le temps. La période la plus proche de nous qui pourrait me plaire, ce sont les années 60 (je suis d'ailleurs un fan des Beatles !).

10 Dans vos albums, il y a toujours des moments purement historique qui entrecoupent les moments de fiction. Souhaitez-vous que vos lecteurs s'instruisent tout en se divertissant ou est-ce pour apporter une crédibilité à la fiction ?

Ce serait prétentieux que de souhaiter que mes lecteurs s'instruisent. Tant mieux s'ils apprennent quelque chose ou si cela les entraîne vers d'autres lectures en rapport avec le sujet, l'époque en question.

11 Vous avez une façon assez particulière de travailler, après avoir réaliser des crayonnés assez poussés, vous faîtes votre planche sur calque avant de réaliser la planche définitive. A quoi vous sert cette étape intermédiaire ?

J'ai travaillé un peu à cela pendant quelques mois. C'était une expérience très provisoire. Maintenant, je réalise mes planches de façon classique: des crayonnés (très précis, c'est vrai) sur la planche elle-même, puis j'encre.

12 Lorsqu'on lit vos bandes dessinées, on est frappé par votre souci du détail, que cela soit au niveau des décors comme au niveau des costumes, cherchez-vous à être aussi réaliste que possible ?

Avec le recul, je me trouve trop réaliste et je pousse souvent le détail trop loin. Cela donne des planches chargées (ce qui fait quelque part, peut-être aussi leur charme).
Je voudrais pourtant arriver à suggérer davantage, ne pas me sentir obligé de remplir au maximum chaque vignette. Mais c'est difficile d'aller contre sa nature: il faut trouver un juste équilibre entre le souci du détail que nécessite la reconstitution historique et des images aérées qui laissent une place à l'imagination du lecteur.

13 Fait assez rare pour un dessinateur réaliste, vous êtes autodidacte, le considérez-vous comme un avantage ou un inconvénient ? Auriez-vous souhaité suivre des cours ?

Cela ne m'aurait pas fait de tort de suivre des cours avec un bon prof: j'aurais progressé plus vite; je serais peut-être plus à l'aise dans certaines techniques.

14 Vous étiez le principal auteur de l'exposition "Commune Bulle" qui s'est tenue d'octobre 1996 à mars 1997 au musée d'art et d'histoire de SAINT-DENIS, une expérience unique dans le monde de la bande dessinée. Qu'en avez-vous pensé ?

Je ne sais pas si cette expérience est unique, mais en tous cas, c'était une très belle exposition.
Le plus intéressant, c'est qu'un Musée ait fait preuve d'ouverture d'esprit parce que la BD, malgré tout n'a pas toujours la place qu'elle mériterait parmi les autres modes d'expression artistique.

15 Lisez-vous beaucoup de bandes dessinées ? Avez-vous été influencé par certains auteurs ? Êtes-vous impressionné par le travail de certains jeunes auteurs ? Si oui lesquels ?

Je suis loin de lire tout ce qui paraît. Je n'achète que lorsque j'ai vraiment un coup de cœur. Il y a des auteurs que j'aime beaucoup, mais dans quelle mesure m'ont-ils influencé ?
A vous de juger. Quant aux jeunes auteurs, oui de temps en temps, ily en a qui sortent du lot. Est-ce qu'on peut encore considérer Marini, Trondhaim, Guarnido, Blacksad ou Sfar comme de jeunes auteurs ?

16 Quel sera le après "Les voleurs d'Empires" ?

Ce sera une nouvelle collaboration avec Jean Dufaux. Je n'ai pas envie de trop en dire avant que le contrat ne soit signé.
Ce que je peux néanmoins dévoiler, c'est qu'avec ce projet, je reviens à mes premières amours, puisqu'il se situe au tout début du XIXème siècle. D'autre part, la conception sera différente des Voleurs d'Empires qui constituent un long roman dont chaque tome n'est qu'un chapitre.
Chaque épisode formera une histoire complète (éventuellement une intrigue s'étalant sur 2 tomes) un peu dans l'esprit de Giacomo C.
Ce sera une trame plutôt policière et des histoires moins "macabres" que les Voleurs d'Empires, davantage d'humour, de fantaisie et de légèreté.

17 Souhaiteriez-vous faire du scénario ?

Oui, j'aimerais pouvoir un jour concrétiser certaines idées qui me trottent en tête depuis longtemps, mais quand ? et peut être aussi un jour faire un album d'illlustrations pour enfants ...
De toute façon, cela me prendra pas mal de temps (tel que je me connais !!!)
Donc d'ici là, je laisse mûrir et je préfère travailler avec un excellent scénariste !

18 Lors de notre précédente interview avec votre cousine Corine JAMAR, nous avons évoqué l'idée d'une collaboration familiale. Souhaiteriez-vous travailler avec votre cousine Corine JAMAR ?

"Jamar & Jamar", pourquoi pas ? Je compte bien lui en reparler.
De nouveau se pose la question du temps; l'envie est là, mais je ne suis pas un dessinateur super rapide (!); je ne peux donc me consacrer sérieusement qu'à une série à la fois. Mais comme j'espère avoir encore quelques bonnes années devant moi, tout est possible ...

Encore merci du temps consacré pour cette interview. A bientôt.